Aux « Bastilles littéraires » : la Latinité reconnaissante

Nelson Vallejo-Gómez

L’Académie de la latinité a été créée à Rio de Janeiro le 13ème jour du mois de mars, l’an 2000 du temps de la Croix. Sa filiation historique comme mémoire, source d’innovation et d’anticipation, est complexe. Nous entendons des voix singulières et présentes, passées et à venir à la recherche de l’Universel concret qui configure. Nous avons déjà quelque expérience des universaux abstraits qui défigurent. Notre voie de recherche est parfois logique ; elle est surtout dialogique. Nous n’avons pas encore, hélas ! lu tous les livres, et la chair est toujours joyeuse. Quelle lassitude si nous avions à observer tous les cygnes avant de conclure à quelque blancheur que ce soit !

Académie est à l’origine le nom grec donné à l’une des plus célèbres écoles de Philosophie, fondée par Platon et ses disciples vers l’an 387 av. J.-C. dans un jardin consacré au héros athénien Academos. Sur le fronton était inscrit le précepte : nul n’entre ici s’il ignore la géométrie. Il fallait donc, pour le dire en termes pascaliens, un esprit de géométrie, dans lequel les principes sont palpables, mais invisibles, et pour cela même éloignés de l’usage commun. L’amitié et l’enseignement oral étaient les autres piliers de l’Académie. En termes pascaliens, il s’agissait de faire preuve d’esprit de finesse, dans lequel les principes sont dans l’usage commun et devant les yeux de tout le monde. On ne sait toujours pas si les Dialogues platoniciens, dans l’esprit de géométrie, sont les transcriptions de ces leçons orales et amicales, en particulier celles de son ami et maître Socrate, ou si, au contraire, ils sont les commentaires, dans l’esprit de finesse, de la philosophie de Platon. Aussi, pourrait-on dire, en plagiant Borges, qui plagia Shaw, que Socrate paraît être un personnage inventé par un romancier génial appelé Platon. De plus, ces Dialogues extraordinaires témoignent de la grandeur de la civilisation grecque et des sédiments interculturels conceptuellement riches, échangés entre l’Orient et l’Occident, depuis la nuit des temps en Méditerranée, carrefour légendaire et, notamment, berceau de la triade monothéiste juive, chrétienne et musulmane.

Parmi tous les éléments qui composent la Latinité, ceux du platonisme, assimilé par le christianisme, sont fondamentaux. Nous le verrons plus tard lorsqu’il sera question de dire que la vertu des grands hommes est enseignement à apprendre et témoignage à imiter.